REVELATION, Autre, Métaphore, Grâce

Le sens général de la Révélation juive est l'ouverture à l'Autre, Autre reçu dans sa puissance créatrice, de même que l'homme a été créé par Dieu comme son Autre, par métaphore, à son image. Le secret de tout être est cette altérité constitutive, accordée par la grâce de Dieu, qui est appel à se signifier par le langage, à s'identifier métaphoriquement à l'Autre, et finalement à poursuivre la création. Si la philosophie grecque, dans sa visée épistémique, s'est centrée plutôt sur l'Etre (l'Autre s'identifiant à l'Etre), elle n'est pas quitte de sa relation essentielle à l'Autre, le philosophe dispensant sa grâce lui aussi, implicitement, à son interlocuteur (Socrate faisant de l'esclave son alter ego en intelligence).

"Que, pour le dégagement, en toute langue, de la signification essentielle en question et pour la libération du principe créateur de cette signification, la rupture par la Révélation religieuse et, de là, par l’avènement de la philosophie soit décisive, nous l’avons souvent dit. La Révélation appelle à dépasser le rejet de l’Autre, de l’autre homme, la violence sacrificielle exercée contre lui et, bien au contraire, à espérer cet Autre, à l’accueillir et à l’aimer dans la puissance créatrice qu’il a comme Autre... La portée majeure accordée par la Révélation, à la différence de ce qu’on peut voir dans la philosophie grecque, au langage, serait le signe de la mise au premier plan de la relation à l’Autre en général. Mais, si la pensée biblique peut être opposée, en cela, à la lettre de la philosophie grecque, cela ne vaut, selon nous, que pour la thématisation que la philosophie propose (et doit proposer) à son commencement. La grâce (avec l’élection) est par elle en fait présupposée dans la relation de Socrate avec ses interlocuteurs, et elle deviendra l’un des thèmes majeurs de la philosophie contemporaine. Trigano ("L’Hébreu, une philosophie") note à juste titre l’identification, dans la Bible (et elle serait également fondatrice pour la philosophie), de Dieu et de l’être. Il parle du « coup de force philosophique qui fonde la pensée juive : le radical du verbe être (HVH) [donnant] le nom divin YHVH, qui est une forme (erratique) de la conjugaison du verbe être."
JURANVILLE, 2017, HUCM

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