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CONNAISSANCE, Métaphysique, Sujet, Existence

En matière de connaissance, la métaphysique évite la question de la finitude radicale, ainsi que la relation à l'Autre comme tel. A l'époque antique, en plaçant la vérité dans l'objet à connaître, indépendamment des limitations du sujet ; à l'époque moderne, en situant au contraire la vérité dans le sujet, à partir de quoi seulement l'objet peut être connu. Avec cette conséquence que la connaissance métaphysique s'accomplit sous la forme d'une auto-objectivation du sujet tendant à faire disparaître l'extériorité de l'objet... et donc, avec ce dernier, le principe même de toute connaissance objective au profit du seul savoir (intérieur). Il est facile de voir qu'une telle connaissance métaphysique, avec son sujet tout puissant, réalise un fantasme sexuel, pervers qui plus est, où l'objet est censé venir combler tout manque dans l'Autre. Inversement, c'est contre toute forme de connaissance absolue et vraie que se dresse la pensée de l'existence, au nom du choix existentiel (« Choisis-toi toi-même » énonce Kierkegaard) et de la confrontation avec la finitude, primant sur toute démarche de connaissance (y compris le « Connais-toi toi-même » de Socrate). Lacan en particulier, remet radicalement en question les préjugés liés au statut épistémique de l'objet aussi bien que celui du sujet, les ordonnant plutôt, du point de vue de la psychanalyse, à la cause de désir. Toutefois la question des conséquences sociales et politiques d'une telle position reste entière et non résolue.


"La pensée de l’existence récuse toute idée de connaissance absolue. Pour elle, la connaissance, comme détermination effective de l’objet dans son unité par le sujet dans son unité, est une illusion. Illusion caractéristique aussi bien de la conception traditionnelle que de la métaphysique. Illusion par quoi l’existant se dissimule son existence... Ils maintiennent le refus, propre à toute la pensée de l’existence, de toute connaissance vraie qui pourrait se poser comme raison pure, et donc ordonner un monde social nouveau. Et alors on peut douter qu’il y ait eu véritable rupture avec l’ordre traditionnel et avec la connaissance comme « fantasme de l’inscription du lien sexuel ». Que la mystique glorifiée par Lacan se distingue réellement de la mystique érotique traditionnelle qu’il a si constamment dénoncée."
JURANVILLE, ALTER, 2000

METAPHORE, Existence, Analogie, Métaphysique, HEIDEGGER

Une philosophie ignorant l'existence essentielle (et la finitude qui la caractérise) ne peut qu'ignorer également la métaphore (comme identification à l'Autre), la réduire à une figure simple comme l'analogie ou la comparaison, pour finalement ramener tout sujet au Même, dans une temporalité homogène qui est aussi négation du temps. C'est le cas des rhétoriciens (comme Fontanier) qui n'y voient que procédé formel, des métaphysiciens qui ne sortent guère de l'axe analogique sensible-intelligible (cf. la critique de Heidegger), des scientifiques qui la réduisent à une association non essentielle tout en la parant de vertus illustratives et pédagogiques.

"Mais, quel que soit l’effet d’éclairement surprenant, d’étrangeté, de surprise que la métaphore comme analogie puisse susciter, elle ne laisse de renvoyer, partant d’un élément concret donné dans l’expérience, à un au-delà qui n’est pas un Autre vrai, à une identité et signification anticipative, hors temps. Exemple par excellence, celui de l’Allégorie de la caverne au livre VII de La République de Platon, où l’au-delà est celui du Bien par rapport au soleil, le soleil étant l’analogue sur le plan physique, par son action éclairante et fécondante, du Bien sur le plan métaphysique. De là ce qu’il y a de tout à fait légitime dans la critique de Heidegger contre la métaphore: « Le métaphorique n’existe qu’à l’intérieur de la métaphysique » – celle-ci caractérisée par la « séparation du sensible et du suprasensible comme de deux domaines subsistant chacun pour soi. » À quoi Heidegger oppose la vérité originelle des noms: « Puisque notre entendre et notre voir ne sont jamais une simple réception par les sens, il ne convient pas non plus d’affirmer que l’interprétation de la pensée comme saisie par l’ouïe et le regard ne représente qu’une métaphore. » Nous entendons par tout notre être une sonate de Beethoven, et non pas par nos oreilles une suite de sons (« C’est nous qui entendons, et non l’oreille. »), nous voyons de même un tableau de Van Gogh, et non pas par nos yeux telles taches de couleur. Sauf que la métaphore ne se réduit pas forcément à l’analogie. Et que le propre de l’homme, c’est que la vérité originelle des noms, par et pour lui, est d’abord perdue et doit être reconstituée."
JURANVILLE, 2024, PL

INDIVIDU, Universel, Métaphysique, Existence

La tradition métaphysique n'a de cesse de rabattre l'individu soit sur une conception de l'espèce (d'Aristote à Leibniz), soit sur un concept d'universel agissant (l'Unique toujours déjà là se déployant en toute chose, avec Hegel) ; l'individu réel est alors identifié soit à l'Etat, soit à une partie de l'Etat, soit au principe constituant de l'Etat. C'est avec la pensée de l'existence que l'individu répond, à l'appel de l'Autre, de son être propre (unicité et identité), en même temps que de sa finitude, quitte à reconstituer à partir de là, imprévisiblement, un universel.

"On peut, au-delà de Platon par lequel commence la philosophie, et qui s’en tient au général (l’universel) et ignore, au moins thématiquement, l’individuel (le singulier), vouloir donner, avec Aristote, vérité à l’individu, mais alors à l’espèce comme individu, et non pas à ce qu’on appelle habituellement ainsi... On peut aussi, au-delà d’Aristote, vouloir donner, avec Leibniz, vérité à ce qu’on appelle habituellement l’individu. C’est ainsi que, pour Leibniz, chaque individu (au sens habituel) est comme monade le lieu d’une « différence interne », essentielle (principe de l’identité des indiscernables). Mais l’individu est alors lui-même ramené logiquement à l’espèce, il est species infima... On peut enfin, au-delà de toute détermination ou différence déjà advenue, au-delà et d’Aristote et de Leibniz, mais en dégageant pour l’individu en général ce qui est proclamé chez eux pour le seul individu divin, envisager, avec Hegel, l’individu ou singulier comme le général ou universel en acte... Mais, dans tous ces cas, on en reste à un universel toujours déjà là qui se déploie, et dont l’individu est, au mieux, la présence en acte : pas de vérité propre de l’individu comme tel. Avec l’existence tout change."
JURANVILE, 2000, JEU