Comme vérité de l'autonomie, la création - qu'elle soit humaine ou divine - veut la loi, la loi telle qu'elle provient de l'Autre comme cause - que cet Autre soit déjà là ou à venir. Mais par ailleurs la loi demande à être justifiée par la raison, qui elle-même demande à être posée socialement dans le savoir (pour répondre à toutes les objections).
CREATION, Raison, Autonomie, Loi
CAUSE, Identité, Oubli, Loi
L'identité avec l'existence définit la cause, laquelle fait acte de la loi pour le sujet. Cette loi, le sujet s'en saisit pour reconstituer peu à peu une nécessité à travers l'oeuvre - mais toujours d'abord le fini refuse pareille cause remettant "en cause" son identité immédiate et l'appelant à devenir cause lui-même. D'abord, par la grâce, la cause se donne comme objet fini (agissant comme cause matérielle), lequel est censé se faire oublier comme tel - mais l'existant refuse d'oublier l'objet, le fausse et l'absolutise, refoulant de ce fait la cause elle-même (comme dans la science). Ensuite, par l'élection reçue de l'Autre, la cause se donne comme sujet (agissant comme cause formelle), lequel peine à s'oublier comme substance, en tout cas comme conscience faussement souveraine (comme souvent en philosophie). Puis, par la foi, la cause se donne comme Autre (agissant comme cause finale), pour permettre à l'existant d'affronter la finitude et d'accepter l'oubli essentiel, afin de devenir Autre à son tour - mais le fini fausse cet Autre, lui attribuant une puissance sans finitude (quand la religion vire à la superstition). Enfin, par le don, la cause se donne comme Chose (agissant comme cause efficiente), Chose créatrice ouverte sur son Autre, ce que doit devenir à son tour le sujet existant par l'accomplissement de l'oeuvre.
DISCOURS DU MAITRE, Loi, Fantasme, Politique, LACAN
"Cette fixation au fantasme est ce qui bloque la sublimation. Certes le maître est le castré, celui qui s’est assujetti à la loi de la castration, en s’exposant à la mort. Il a sublimé. Mais le discours du maître ferme l’accès à la sublimation. De la Chose n’est retenu que l’objet a . Et la jouissance de l’Autre ne peut plus se dégager de la jouissance sexuelle. Le discours du maître conforte en l’autre l’illusion qu’il y a un rapport sexuel, que le masculin et le féminin se complètent et constituent l’harmonie du monde. L’autre sait pourtant, et le savoir établit, qu’il n’y a pas de rapport sexuel. Mais le maître permet à l’autre de supporter ce savoir qu’il a en horreur, en en dissimulant les conséquences dernières. Il est le castré, celui qui s’est sacrifié, qui a payé pour les autres, et c’est pour cela qu’il reçoit tous les honneurs. Le discours du maître n’implique aucune haine parce que personne ne veut s’y identifier au maître."
JURANVILLE, LPH, 1984
DISCOURS DU MAITRE, Loi, Plus-de-jouir, Fascination, LACAN
"Le discours apparaît dans le monde social – et c’est là qu’il a sa réalité matérielle – comme réponse à la question qui se pose aux hommes quant à ce qu’ils ont à être. Et cette réponse consiste d’abord à énoncer la loi qui organise ce monde. Une loi qui est initialement celle de l’Autre absolu faux, de l’idole, mais qui n’est pas définitivement celle-là, et pourra devenir celle de l’Autre absolu vrai, du vrai Dieu. Ambiant dans le monde social, ce primordial discours peut être déployé expressément comme tel, comme raison et donc savoir rationnel. Il justifie ce qui est. Mais ce qui est est d’abord inévitablement injuste, parce que l’effet de ce discours sur son autre, sur celui auquel il s’adresse, est alors non pas de l’aider à se conformer à la loi énoncée, mais de le vouer à la fascination devant cette raison et de le soumettre à l’arbitraire éventuel de celui qui tient le discours... Celui qui tient ce primordial discours suscite en son autre la toujours présente, toujours prête à surgir à nouveau soumission fascinatoire devant le tout social, devant l’idole selon la loi de laquelle le tout est ordonné et devant le maître qui incarne cette idole – non pas maître qui enseigne, mais maître qui domine. Soumission fascinatoire dont on peut dire qu’elle est libre, mais d’une liberté qui se perd – c’est là une des formes de la pulsion de mort – et qui ne peut plus se recouvrer par soi, il y faudra l’Autre."
JURANVILLE, 2024, PL