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ANGOISSE, Peur, Hétéronomie, Autonomie, HEIDEGGER

L’angoisse, distincte de la peur, précède cette dernière et plonge le sujet dans une expérience de finitude radicale et d’hétéronomie, où le sens émerge de l’Autre absolu. Heidegger la décrit comme une angoisse face à l’être-au-monde, révélant le néant et la transcendance, contrairement à la peur qui concerne l’étant intramondain. Pourtant, loin de s’opposer à la peur, l’angoisse y conduit, en tant que peur essentielle, en projetant le sujet dans un temps imaginaire où il découvre sa condition humaine. Elle angoisse précisément parce qu’elle annonce le passage au temps réel, celui de l’urgence et de l’action, de l'objectivité qu'il faudrait assumer. Ainsi, l’hétéronomie de l’angoisse fonde l’autonomie de la peur, qui suppose à son tour une reconnaissance de cette hétéronomie initiale. Heidegger, qui ne dit rien de la peur essentielle et encore moins de son horizon objectif, décrit seulement la peur mondaine comme déchéance et fuite devant l'angoisse. A ce titre il est vrai que la peur (ou l'angoisse évitée) ramène le sujet à la condition d'objet fini, sous l'effet de la pulsion sexuelle devenant pulsion de mort à mesure qu'elle s'articule autour de l'Autre réduit lui-même à un objet, à un fétiche en guise de maître. Cet Autre faux régissant le monde social n'appelle certes pas le sujet à éprouver la finitude ni à conquérir l'autonomie, plutôt l'encourage-t-il - comble du désespoir - au sacrifice.


"L'angoisse précède la peur. Elle est unicité, où le savoir s’effondre et où est éprouvée la finitude radicale. Et en même temps hétéronomie, le sens et la loi apparaissant alors en l’Autre absolu seul, au-delà de soi et de son monde à soi. Face à la peur qui serait peur devant l’étant intramondain, Heidegger la présente ainsi comme angoisse devant l’être-au-monde lui-même (devant l’être). Comme le sentiment décisif, parce qu’elle « révèle le néant » (l’être au-delà de l’étant), la « transcendance », le « méta-physique ». Mais, bien loin de s’opposer à la peur qui serait, comme le veut Heidegger, une « angoisse inauthentique », l’angoisse dirige au contraire, d’après nous, vers la peur essentielle – et c’est même pour cela qu’elle angoisse."
JURANVILLE, 2000, JEU

INCONSCIENT, Angoisse, Création, Interprétation

L'inconscient fait passer de l’interprétation (vérité de l’hétéronomie) à la création (vérité de l’autonomie), ou de la métonymie à la métaphore, comme si la substance et la puissance créatrice de l'Autre passait enfin au fini. C'est toujours l'inconscient qui, par l'interprétation, donne sa vérité à la peur : peur de poser l'autonomie à laquelle l'Autre de l'hétéronomie nous appelle. Et c'est encore l'inconscient qui, par la création, donne sa vérité à l'angoisse : angoisse devant l'hétéronomie essentielle que le sujet devrait poser et assumer par lui-même. Mais le plus souvent, deux cas se présentent revenant à fuir la création : soit le fini se fait sujet social, livré à une peur mondaine ordinaire, tétanisante (devant les maîtres par exemple) et fuit l'angoisse dans la sexualité ; soit le fini se fait individu, connait la véritable angoisse de la séparation, mais il lui manque le courage d'oeuvrer pour instituer un monde juste, ce qui revient à nier autant l'hétéronomie que l'autonomie vraies.


"Or, dans le second cas comme dans le premier, lorsqu’on proclame l’angoisse en excluant tout savoir vrai comme lorsqu’on rejette toute angoisse par le savoir faux, ne demeure-t-il pas la même évidence d’un monde social dans lequel il n’y a pas de place pour l’autonomie du fini ? Cette évidence n’est-elle pas « inspirée » par la pulsion de mort, par le rejet de l’Autre vrai qui appelle à s’affronter jusqu’au bout à la finitude et à l’angoisse, et par la constitution de l’Autre faux ? Ne faut-il pas, pour l’angoisse elle-même, instituer le monde juste où l’épreuve de l’angoisse fondamentale, et donc sa propre capacité d’instituer des jeux, soit ouverte à chacun ?"
JURANVILLE, 2000, JEU