Dès lors que l'existence essentielle est affirmée, l'aliénation doit être reconnue comme constitutive de la relation à l'Autre, car cette altérité de l'Autre et en même temps l'identité nouvelle qu'on reçoit de lui est toujours d'abord refusée. L'existant réduit alors sa propre identité au statut de déchet par rapport à un Autre ramené lui-même à une identité mythique et close. Pire, la négation sociale de cette réalité de l'aliénation - effet de l'aliénation elle-même - conduit au projet sacrificiel d'éliminer ceux que le peuple désigne comme responsables de cette déchéance, les réduisant alors eux-même à la pire des déchéances - ce qui a débouché historiquement à la catastrophe de l'holocauste. Le juif, soi-disant refermé sur son identité et considéré volontiers comme parangon du capitaliste, est ainsi accusé d'avoir confisqué les conditions de toute émancipation : il est condamné à payer à la place de ceux qui, en réalité, refusent justement de payer le prix pour s'émanciper (ce qui, une nouvelle fois, définit l'aliénation).
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ALIENATION, Déchéance, Identité, Holocauste
"Et la volonté illusoire d’éliminer toute aliénation devient alors volonté de rendre à ceux qui sont pris dans l’aliénation les conditions dont on les aurait prétendument privés, expropriés. Illusion, bien sûr, aux yeux de qui affirme l’existence, parce que les conditions sont toujours d’abord refusées par l’existant qui s’abandonne complaisamment à l’aliénation, et parce qu’il ne suffit nullement de les lui redonner pour qu’il les accueille enfin. C’était l’illusion de Marx de croire que la plus-value était de l’ordre de la création. Et qu’elle se trouvait scandaleusement extorquée au travailleur, parce que celui-ci ne disposait plus des conditions de son travail que se serait appropriées le capitaliste. Alors qu’elle est l’objet en tant que s’y marque le refus de la création, et qu’elle est par avance extorquable."
JURANVILLE, ICFH, 2010
ABANDON, Finitude, Surmoi, Déchéance
L'abandon ordinaire, refusant la finitude, et donc tout abandon réel à l'Autre absolu vrai, conduit à la constitution d'un Autre absolu faux, bon ou méchant, Idéal-du-Moi ou Surmoi, qui ne fait que conforter le système social sacrificiel et réduit l'abandon à une déchéance.
"L’abandon ordinaire est d’abord et toujours fondamentalement rejet haineux de l’Autre absolu vrai. Rejet haineux de cet Autre, parce que celui-ci, voulant pour lui-même toute la finitude, et s’abandonnant au fini comme à son Autre, l’appelle à revouloir lui aussi toute la finitude, et à s’abandonner à son tour du même abandon, dont il lui donne toutes les conditions – mais le fini refuse d’abord de s’abandonner ainsi. L’abandon ordinaire est, à partir de là, représentation fausse de cet Autre absolu comme méchant... Il l’aurait abandonné, « largué », laissé tomber, lui aurait refusé ce qu’il devait lui donner – alors que, soulignons-le, c’est le fini lui - même qui toujours d’abord tend à infliger un tel abandon, un tel refus à son Autre. Représentation fausse qui n’est autre que la constitution de l’Autre absolu faux ou Surmoi. L’abandon ordinaire est ensuite représentation fausse d’un Autre absolu bon qui, certes lui-même hors finitude, protégerait, dans sa bonté, le fini de l’épreuve douloureuse de la finitude. Et c’est à un tel Autre, et à tous ceux qui s’identifieraient à lui, que le fini alors s’abandonnerait d’un abandon « serein », « confiant », accédant peu à peu à un savoir socialement reconnu. Représentation fausse de l’Autre absolu comme Idéal du moi, qui n’est que l’autre face, inessentielle, de l’Autre absolu faux comme Surmoi. L’abandon ordinaire est enfin organisation, prétendument par amour pour cet Autre, du système social sacrificiel, où la haine maintenue contre l’Autre absolu vrai se transforme en violence contre la victime – elle-même cruellement abandonnée, « abandonnée à son triste sort », pour autant qu’elle incarne celui qui, individu, peut vouloir s’abandonner jusqu’au bout et assumer, dans l’autonomie, la finitude radicale de l’humain."
JURANVILLE, 2000, JEU
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