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CHOSE, Individu, Abandon, Parole

Le sujet doit se poser comme l'Autre de la Chose, pour devenir enfin Chose lui-même. Comment ? En se faisant Individu, contre le monde social qui tend à s'identifier abusivement à la Chose, hors toute finitude, et qui sacrifie quiconque se proclame individu (le Christ suprêmement). Il s'agit pour le sujet de recueillir l'être de Chose que la Chose lui cède par sa parole créatrice, comme à son tour il abandonnera l'être aux Choses en les nommant.


"L’individu est ainsi celui dans lequel s’accomplit l’abandon. Celui auquel la chose parlante et créatrice s’abandonne, jusqu’à ce qu’il s’abandonne à son tour, par sa propre parole créatrice. Celui, on peut le dire aussi, auquel les choses ont été abandonnées par la parole originelle, et qui a dès lors, dans sa propre parole abandonnante et créatrice, « nominative », à les nommer et les re-nommer, les créer et les re-créer – comme dans la Genèse, où il est dit des bêtes sauvages et des oiseaux du ciel que Dieu « les amena à l’homme pour voir comment celui-ci les appellerait : chacun devrait porter le nom que l’homme lui aurait donné ». "
JURANVILLE, 2000, JEU

ABANDON, Finitude, Parole, Signifiance

L'abandon se définit comme vérité de la finitude, assentiment donné à cette finitude que l'on éprouve dans la relation à l'Autre, dans l'idée que l'Autre donnera aussi vérité à la finitude en s'abandonnant à son tour, jusqu'à ce que tout homme finisse pas reconnaitre cette finitude principalement dans le savoir. Or accueillir la finitude et s'abandonner dans le savoir revient à accueillir la signifiance, la vérité de la signifiance c'est-à-dire la parole - parole qui est ce que l'on donne, donc l'acte même de l'abandon, à tout Autre, jusqu'à la constitution d'un savoir rationnel pour tous.

"Parce que l’abandon n’est pas simplement finitude, mais vérité de la finitude, celle-ci devant apparaître bonne et essentielle aux yeux de tous, accueillir l’abandon essentiel, c’est accueillir la vérité de la signifiance, celle-ci devant, elle aussi, apparaître essentielle aux yeux de tous ; c’est donc accueillir la parole. Parole qui, comme vérité et en même temps signifiance, est ainsi l’acte de l’abandon, l’acte par lequel celui qui s’abandonne se tourne vers son Autre dont il attend le même abandon – et la même parole. L’abandon étant ce par quoi on veut le jeu, et s’engage à l’instituer ou le réinstituer comme nouveau, la parole est alors l’objectivité même de la puissance créatrice, en l’Autre absolument Autre et, à partir de là, dans le fini... Et principe créateur, par lequel on s’engage à assumer toute la finitude et à répondre à toutes les objections. De là le poids d’une vraie parole, par exemple quand on « donne sa parole » – et tous n’ont pas de « parole », ne sont pas capables de « donner leur parole ». Et signifiance supposée venir en l’Autre. Pas de parole qui ne vise la parole de l’Autre, qui n’appelle à parler."
JURANVILLE, 2000, JEU

ABANDON, Foi, Objectivité, Autre, KIERKEGAARD

C'est d'abord l'Autre absolu qui, en s'abandonnant, accorde au fini les conditions - essentiellement la foi - pour accéder à la vraie autonomie et à l'objectivité absolue dans ses oeuvres. Car celui qui a la foi, en s'abandonnant à son tour au fini, et en lui redonnant toutes les conditions d'abord données par l'Autre absolu, peut être assuré que son oeuvre sera reconnue universellement. Mais s'abandonner aux autres, dans le monde ordinaire, sans s'abandonner d'abord à l'Autre absolu, ne permettra pas la reconnaissance des oeuvres individuelles par lesquelles des individus témoignent de leur foi, plutôt ces oeuvres seront-elles stigmatisées. Inversement celui qui s'abandonne à l'Autre absolu (à la manière de Kierkegaard) en refusant d'envisager l'abandon à tout autre et en déniant à celui-ci toute possibilité de parvenir à l'objectivité absolue, celui-là s'en tient au "paradoxe" et ne parvient pas non plus à l'autonomie absolue.

"À l’abandon ordinaire, qui permet certes d’accéder à l’objectivité reconnue dans le monde commun, mais qui est clôture sur soi du sujet fini et rejet, par celui-ci, de l’Autre absolu, la pensée de l’existence oppose un abandon vrai. Un abandon par quoi le sujet, contre l’autonomie illusoire où il s’enfermait, accepte sa finitude radicale, et s’abandonne, comme individu, à l’Autre absolu. Kierkegaard part de l’abandon traditionnellement attribué à la femme (« Son être est attachement, abandon, sinon elle n’est pas femme »). Cet abandon peut errer, s’arrêter à l’homme sans aller jusqu’à Dieu, transformer son objet en idole, comme Marguerite avec Faust. Mais, essentiellement, il dépasse tout Autre fini. Il est alors aussi bien masculin que féminin, abandon de la créature en général, où celle-ci, ayant renoncé au moi faux, trouve son vrai moi. Et Kierkegaard remarque d’autre part que l’Autre absolu lui-même, par le paradoxe, s’abandonne au fini. Certes Kierkegaard, comme toute la pensée de l’existence, accorderait que le fini, s’abandonnant à l’Autre absolu qui lui-même s’abandonne, reçoit alors de cet Autre les conditions pour assumer la finitude, et accède à l’autonomie réelle. Autonomie de la foi qui est le « tiers » par quoi « le disciple arrive à entrer en contact avec le paradoxe, quand l’intelligence se résorbe et que le paradoxe s’abandonne ». Kierkegaard accorderait même que le fini se heurte alors à l’objectivité réelle et vraie, celle du paradoxe, celle, pour Lacan, de l’objet « a ». Mais il exclut qu’on puisse, par-là, entrer dans un mouvement qui amène jusqu’à une objectivité absolue reconnue par tous."
JURANVILLE, 2000, ALTERITE

ABANDON, Sublimation, Psychose, oubli

De même que l'oubli, sublimation finie, conduit à sombrer dans la névrose pathologique en cas de refus du savoir, de même l'abandon, sublimation totale, conduit à sombrer dans la psychose pathologique, exactement pour la même raison, au lieu de poser la bonne psychose, celle qui accueille l'inconscient.

"L’oubli, ce qu’on joue, ce à quoi on joue, nous était apparu comme en soi sublimation finie, dans le cadre de la névrose, de la bonne névrose. Mais nous avons vu ensuite – réalité de l’oubli – que, si cette sublimation finie ne débouche pas sur le savoir, on retombe alors, en fait, dans l’ordinaire névrose pathologique. L’abandon, ce qui joue, ce par quoi on joue le jeu, vient de nous apparaître, lui, comme en soi sublimation totale, où la finitude est absolument revoulue. Or – réalité de l’abandon – si cette sublimation totale ne débouche pas sur le savoir, on reste alors pris en fait dans l’ordinaire psychose pathologique. Et si la sublimation totale peut s’accomplir effectivement et atteindre au savoir, au savoir philosophique, c’est pour autant qu’elle aura laissé venir en elle, et posé comme telle, la bonne psychose, celle qu’implique l’inconscient."
JURANVILLE, 2000, JEU

ABANDON, Finitude, Surmoi, Déchéance

L'abandon ordinaire, refusant la finitude, et donc tout abandon réel à l'Autre absolu vrai, conduit à la constitution d'un Autre absolu faux, bon ou méchant, Idéal-du-Moi ou Surmoi, qui ne fait que conforter le système social sacrificiel et réduit l'abandon à une déchéance.

"L’abandon ordinaire est d’abord et toujours fondamentalement rejet haineux de l’Autre absolu vrai. Rejet haineux de cet Autre, parce que celui-ci, voulant pour lui-même toute la finitude, et s’abandonnant au fini comme à son Autre, l’appelle à revouloir lui aussi toute la finitude, et à s’abandonner à son tour du même abandon, dont il lui donne toutes les conditions – mais le fini refuse d’abord de s’abandonner ainsi. L’abandon ordinaire est, à partir de là, représentation fausse de cet Autre absolu comme méchant... Il l’aurait abandonné, « largué », laissé tomber, lui aurait refusé ce qu’il devait lui donner – alors que, soulignons-le, c’est le fini lui - même qui toujours d’abord tend à infliger un tel abandon, un tel refus à son Autre. Représentation fausse qui n’est autre que la constitution de l’Autre absolu faux ou Surmoi. L’abandon ordinaire est ensuite représentation fausse d’un Autre absolu bon qui, certes lui-même hors finitude, protégerait, dans sa bonté, le fini de l’épreuve douloureuse de la finitude. Et c’est à un tel Autre, et à tous ceux qui s’identifieraient à lui, que le fini alors s’abandonnerait d’un abandon « serein », « confiant », accédant peu à peu à un savoir socialement reconnu. Représentation fausse de l’Autre absolu comme Idéal du moi, qui n’est que l’autre face, inessentielle, de l’Autre absolu faux comme Surmoi. L’abandon ordinaire est enfin organisation, prétendument par amour pour cet Autre, du système social sacrificiel, où la haine maintenue contre l’Autre absolu vrai se transforme en violence contre la victime – elle-même cruellement abandonnée, « abandonnée à son triste sort », pour autant qu’elle incarne celui qui, individu, peut vouloir s’abandonner jusqu’au bout et assumer, dans l’autonomie, la finitude radicale de l’humain."
JURANVILLE, 2000, JEU

ABANDON, Finitude, Autre, Sublimation

L'abandon vrai est celui par lequel le fini s’abandonne à l’Autre absolu, comme cet Autre toujours déjà s’abandonne à lui, tous deux revoulant la finitude ; mais d'abord le fini ne veut pas de cet abandon, par rejet de la finitude, et sombre dans la déchéance sociale - ou bien refuse l'épreuve du savoir qui pourrait conduire le monde social vers cet abandon.

"La pensée de l’existence récuserait notre conception de l’abandon vrai par lequel le fini s’abandonne à l’Autre absolu, comme cet Autre toujours déjà s’abandonne à lui. Abandon par lequel le fini reveut toute la finitude, comme cet Autre toujours déjà la veut. Abandon par lequel le fini s’engage, comme individu, à « jouer le jeu » jusqu’au bout, jusqu’à instituer lui-même, sur fond de jeu de l’Autre, le jeu du savoir. Et certes il nous faut bien reconnaître que l’abandon, pour le fini, n’est pas d’emblée celui-là. Et que, d’abord, ou bien il affirme un abandon qui permette un savoir reconnu, dans le cadre d’un monde social, et alors c’est un abandon faux, celui de la déchéance, dans lequel on ne s’abandonne pas et rejette en fait la finitude radicale, ou bien il veut un abandon vrai, à l’Autre comme tel, avec toute la finitude, et alors il doit exclure tout savoir et tout monde social à quoi mènerait cet abandon. Mais n’est-ce pas justement en excluant ainsi tout savoir nouveau, qu’on entretient le plus radicalement ce qui fait le fond de l’abandon ordinaire et faux ?"
JURANVILLE, 2000, JEU