Affichage des articles dont le libellé est Bien. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Bien. Afficher tous les articles

CHOSE, Bien, Jouissance, Sujet, Vérité, LACAN

Dans la conception de Lacan la Chose apparaît comme un Souverain Bien paradoxal : à la fois visée essentielle du désir, mais aussi objet fondamentalement mythique et absent. Autrement dit le Souverain Bien n'existe pas, et la jouissance de la Chose n'est pas tant interdite que réellement impossible. Pourtant le sujet ne laisse pas d'avoir affaire à la Chose (on ne parle pas ici de la relation à l'objet dans le fantasme), puisqu'elle est constitutive de son désir : en tant que substance jouissante autant que substance signifiante, elle n'est pas moins que "la vérité qui parle" dit Lacan. Inversement l'on ne peut pas dire la vérité sur la Chose, et son être, tout comme celui du sujet, demeure indicible : « C’est bien ce qui fait que l’ontologie, autrement dit la considération du sujet comme être, l’ontologie est une honte, si vous me le permettez ! » (Lacan). Dans le cadre de la psychanalyse, tout savoir sur la jouissance de la Chose reste par principe inaccessible - disjonction de la vérité et du savoir -, et le devenir-Chose du sujet, l'accès à son autonomie de chose, demeure tout autant inconcevable.


"À la différence de Lévinas, Lacan affirme expressément que la chose est, pour le sujet, le Souverain Bien, et que tout le cheminement du sujet est dirigé vers et par elle... Pour lui, « le pas fait, au niveau du principe du plaisir, par Freud, est de nous montrer qu’il n’y a pas de Souverain Bien - que le Souverain Bien, qui est das Ding, qui est la mère, l’objet de l’inceste, est un bien interdit, et qu’il n’y a pas d’autre bien. Tel est le fondement, renversé chez Freud, de la loi morale »... Lacan reconnaît-il au moins, lui, que le sujet accède, par l’éthique, à l’autonomie de la chose ? Le sujet advient bien comme chose. Il la découvre comme « la vérité qui parle », comme substance « signifiante » autant que « jouissante ». Il advient bien à ce qui est affirmé comme une autre jouissance. Lacan, en cela, à la différence de Lévinas, pose, et non pas simplement suppose, l’autonomie. Mais le sujet n’advient pas au savoir de cette jouissance. L’autonomie de la chose comme substance jouissante et parlante se pose sans doute elle-même dans le savoir de la psychanalyse, mais elle ne peut être posée comme telle par le sujet."
JURANVILLE, 2000, INCONSCIENT

BIEN, Absolu, Mélancolie, Cause, LEVINAS

Le Bien est la vérité de l'absolu, l'absolu en tant qu'il doit être vérifié, donc d'une certaine manière atteint et recherché dans une transcendance, au-delà de ce qui est immédiatement présent au sujet. D'où la notion du devoir, qui impose de déterminer le Bien (dans le savoir) et le réaliser (dans l'oeuvre) ; mais aussi celle de la mélancolie qui accompagne le désir d'atteindre, si difficilement, le Bien. La tradition métaphysique détermine le Bien a priori, le présupposant à partir de l'essence (même si elle le situe au-delà, comme Platon) ; tandis que la pensée de l'existence le détermine justement comme ex-sistant, niant toute possibilité de le poser dans le savoir ou de l'identifier au savoir. Ainsi Levinas pointant le Bien dans l'Infiniment Autre (Dieu ou Prochain), mais critiquant la preuve cartésienne de Dieu par l'idée d'infini, refusant au fond l'idée même d'une "cause" divine du Bien - seul le mal, comme radical, à la suite de Kant, apparaît ainsi comme intelligible. Or refuser que la cause puisse être créatrice et imprévisible (ek-sistante), la rabattre sur une cause substantielle, n'est-ce pas la contradiction et l'impasse même faisant le lit ordinaire de la mélancolie, et acter l'impossibilité d'une détermination socialement effective du Bien ?


"Qu’est-ce qui fait apparaître au sujet fini qu’il peut et doit, ayant reconnu l’absolu vrai qui a surgi, le reconstituer dans son immédiateté, par l’œuvre et le savoir ? Ce même absolu comme le bien. C’est le bien qui est la cause de la mélancolie, et ce qui agit par l’évidence. Car le bien est le transcendant, au-delà de ce qui est d’emblée présent dans l’immédiateté du sujet, et donc dans le monde et le savoir communs. Mais il ne serait pas le bien, il serait faux bien, nullement transcendant, s’il n’apparaissait pas comme tel au sujet. Si le sujet, dans son immédiateté, ne devait pas (c’est le bien comme devoir) déterminer ce bien et le réaliser. Et si le sujet ne devait pas, de plus, supposer qu’il a reçu toutes les conditions (sinon, le devoir n’aurait pas de sens) pour le déterminer (dans le savoir) et le réaliser (dans les œuvres en général). Le bien est ainsi absolu et, en même temps, vérité. Vérité de l’absolu. L’absolu en tant qu’il doit être vérifié."
JURANVILLE, 2000, ALTERITE