DROIT DE PROPRIETE, Violence, Capitalisme, Individu,MARX

Le droit de propriété comporte une violence inacceptable autant qu'inéliminable, c'est pourquoi il doit être limité par le droit lui-même, jusqu'à rendre cette violence acceptable. Violence, non pas parce que celui qui possède vole nécessairement son semblable, mais parce qu'en s'accroissant (inévitablement, avec la généralisation des échanges) la propriété consomme toujours plus de main d'oeuvre et fait produire de la plus-value au travailleur. Et aussi parce qu'à l'origine du capitalisme, le droit positif n'a fait que légaliser les vagues de spoliation - à la fois contre l'Etat féodal et contre les petits propriétaires paysans - consacrant le droit du "plus possédant". Expropriation et exploitation capitalistes tant dénoncées par Marx, qui va jusqu'à condamner le droit lui-même comme simple instrument de domination. Mais droit de propriété pourtant légitime dans son principe, car la propriété résulte de l'entreprise et de la création individuelle, que peu d'individus ont le courage, l'opiniâtreté et le talent de conduire à terme (quand bien même ils en auraient reçu les moyens par d'autres). La violence engendrée par la propriété et ses abus n'est pas équivalente à la violence sacrificielle originelle, elle en est juste la forme subsistante inéliminable à l'époque du capitalisme, et c'est donc bien comme droit civil (droit de l'individu et pour l'individu) que ce droit de propriété peut être à la fois reconnu et encadré, en regard du droit du travail et de ses progrès eux-mêmes légitimes.


"La vérité du droit ne peut advenir, comme droit de l’individu, qu’à partir du droit positif combattu dans ce que sa violence a d’inacceptable, et reconnu dans ce que sa violence a d’inéliminable... Le droit s’accorde donc tout à fait avec le système capitaliste. Non pas au sens de Marx où il serait complice de la violence absolue de ce système. Mais au sens où il donne à ce système les limites que celui-ci veut avoir. Ces limites ne lui sont pas imposées de l’extérieur, comme s’il était toujours le système sacrificiel païen dans sa forme brute. Elles se développent bien plutôt à partir de la violence inéliminable du contrat de travail, et elles donnent à l’existant toutes les conditions pour s’arracher à la tentation du paganisme brut et pour devenir et redevenir l’individu. Là est le sens de l’État et du droit – et aussi du capitalisme."
JURANVILLE, 2010, ICFH

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