ANGOISSE, Foi, Jouissance, Répétition

L’angoisse, liée à l’hétéronomie, devrait mener à l’autonomie de l’œuvre et du savoir, exigée par l’Autre, mais le sujet rejette cette autonomie, et avec elle l'angoisse ramenée à sa nature première : fuite de soi et sexualité. Ne pas céder devant l'angoisse implique au contraire d'affirmer l'autonomie, même si elle dépend finalement toujours de l'Autre, et ceci par la foi. D'une part la foi est aussi la seule manière d'accomplir la répétition puisqu'elle permet de donner sens au non-sens. D'autre part, ainsi accomplie par la foi, la répétition devient l'acte même de la jouissance essentielle, par laquelle le sens nouveau peut-être posé socialement et objectivement. En l'absence de foi, nous sommes confrontés à l'alternative fatale : soit l'on prétend bien à un sens objectif et commun faisant fi du non-sens, dans le temps imaginaire, entièrement anticipable, avec sa jouissance (sexuelle) fermée à l'Autre ; soit l'on affirme une vraie répétition (comme le fait Freud avec la pulsion de mort) qui, avec le temps, fera surgir grâce à l'Autre un sens du non-sens (et éventuellement une autre jouissance), mais jamais assumable suffisamment par le sujet pour l'amener jusqu'à l'objectivité dès lors que la foi manque.


"Comment ne pas céder devant l’angoisse ? En affirmant, malgré la finitude, et la dépendance par rapport à l’Autre absolu, l’autonomie. Par la foi, qui pose que, si le sens d’abord ne peut venir que de l’Autre absolu, le fini lui aussi - par ce qu’il a reçu, reçoit et recevra de cet Autre comme vrai - pourra donner sens au non-sens radical qu’il rencontre et éprouve, et accomplir, à son tour, la répétition. C’est une telle foi, celle bien sûr des héros de la Bible, qui est au cœur de la pulsion de vie introduite par Freud.... Sans la foi telle que nous l’avons présentée et affirmée, ce sens nouveau, qu’il ne soit pas, avec Lévinas, ou qu’il soit, avec Lacan, reconnu comme lieu d’une jouissance vraie, ne peut de toute façon pas devenir objectif. A fortiori une telle jouissance. Rien comme une jouissance vraie, caractéristique de l’inconscient, ne peut être posé socialement. N’est-ce pas participer de la commune jouissance sexuelle, présente plus ou moins secrètement dans tout le monde social, que de ne pas poser dans ce monde, contre celle-ci, l’autre jouissance ?"
JURANVILLE, 2000, L’INCONSCIENT

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