C'est avec le doute radical que l'on passe d’un savoir cosmologique potentiel, tourné vers la substance, à un savoir réel centré sur la cause, où Dieu est reconnu comme cause première. L'enjeu étant que ce savoir réel trouve son principe, il faut une preuve de l’existence de Dieu. Or cette preuve ne peut plus être l’argument ontologique, purement formel : elle doit être la première (puis la seconde) preuve par les effets, dans une démarche incluant le doute, mais au-delà de sa simple dimension de refus, comme désir : « Comment serait-il possible que je puisse connaître que je doute et que je désire — c’est-à-dire qu’il me manque quelque chose et que je ne suis pas parfait — si je n’avais en moi aucune idée d’un être plus parfait que le mien ? » (Troisième Méditation, §23). La cause est l’identité originaire à partir de quoi tout ce qui existe pour nous a commencé d’exister. La cause véritable est donc créatrice — en dernier ressort, c’est toujours Dieu lui-même. Chez Descartes, c’est encore l’idée de Dieu en moi, grâce divine, qui déploie le savoir par la libre volonté, à travers les contradictions de la finitude humaine. De ce mouvement naît un nouveau savoir, reconstruit dans sa réalité et doté d’objectivité. Cette objectivité s’exprime dans le langage — non plus pris comme simple proposition, mais comme articulation de propositions. Cela correspond, chez Kant, au jugement hypothétique parmi les jugements de relation, et à la catégorie de la cause. Quant au savoir philosophique qui en résulte, dégagé dans sa nécessité, il possède encore sa propre objectivité, que manifeste le langage pris cette fois comme système de toutes les propositions : un système où, d’une part, toutes les propositions sont produites par un même principe, et où, d’autre part, chacune peut devenir principe pour toutes les autres. Cela correspond, chez Kant, au jugement disjonctif et à la catégorie de la communauté. La communauté véritable est ainsi fondamentalement religieuse : elle est ordonnée par la loi du vrai Dieu, cause première, grâce à laquelle les êtres finis accèdent à leur autonomie de substances individuelles.
DOUTE, Cause, Désir, Savoir, DESCARTES
DON, Symbole, Consistance, Imaginaire
Le don n'est pas de l'ordre de l'avoir. Avant de répondre à un besoin, par exemple économique, le don possède une valeur symbolique, l'objet donné se fait symbole de la consistance d'un monde pour l'Autre. En tant que symbolique le don s'opère à la place d'un Autre, en faveur d'un Autre que l'on considère comme capable à son tour de donner. Or même si l'objet donné a valeur de symbole, cette plénitude envisagée du don est ce qui caractérise l'imaginaire en tant que ce qui est visé, anticipé, est la consistance d'un monde.
DON, Oeuvre, Esprit, Sens
L'objet par excellence du don, que l'on ne peut chercher à posséder puisqu'il est symbolique, est l'oeuvre. Ce don s'effectue par l'écriture en général, qui revient littéralement à croire en l'Autre, à projeter imaginairement le don de l'Autre comme à-venir. Dans l'oeuvre se projette la consistance imaginaire d'un sens, porté par l'articulation symbolique ou littérale. Le symbole est alors ce qui supporte le sens, lequel anime en retour le symbole, le spiritualise. C'est toujours l'esprit qui allume la flamme du don, avant que l'oeuvre ne le réalise.
DON, Finitude, Liberté, Jouissance
La finitude de l'homme tient dans sa capacité limitée de donner, à tirer de soi du symbolique, jusqu'à faire oeuvre. Laquelle oeuvre vient à fixer - pour l'éternité - l'épreuve de souffrance qu'il aura fallu traverser pour ce faire. Mais l'interruption du don chez l'humain n'est pas une fatalité, pas plus que n'est sa propension inverse à la jouissance, elle résulte de la liberté finie qui conduit à choisir le don ou bien la jouissance. Quant à la possibilité toujours offerte à l'homme de choisir le don, elle résulte précisément de l'infinité du don divin, qui lui ne s'interrompt jamais.
SACRIFICE, Dieu, Fils, Spiritualité
Qu'est-ce qui permettra à chaque individu de se considérer dans son essentielle autonomie, en reconstituant pour lui le sens rationnel de la création par Dieu le Père ? Autrement dit, comment passer de l'objectivité à la subjectivité du Dieu de la Révélation, ce Fils qui a dû subir le sacrifice ultime pour mieux le dénoncer et en délivrer les hommes ? C'est justement ce Sacrifice du Fils - vécu dans la Passion en tant qu'homme, mais jusque dans la Résurrection en tant que Dieu - qui révèle aux hommes leur nature spirituelle malgré la finitude - spiritualité assumant et pardonnant la finitude. Et cependant le Fils n'engage pas les hommes à l'imiter dans la perpétuation rituelle du Sacrifice - ce serait revenir à la barbarie et au paganisme - seulement à en recueillir le sens spirituel.
SACRE, Dieu, Raison, Spiritualité
"Cet absolu réapparaitra, par rapport à l'ordinaire totalité de relations, comme liberté et, pour autant qu'il est en soi raison, comme liberté allant jusqu'au savoir d'elle-même, comme spiritualité. Et, puisqu'il réapparaîtra ainsi aux yeux de l'homme qu'il appelle à assumer sa finitude il réapparaitra comme assumant à l'avance cette finitude de l'homme, il réapparaitra dans la réalité, qui est être et finitude. Il réapparaitra donc comme le sacré, puisque spiritualité et réalité définissent le sacré qui est ainsi l'objectivité du dieu, ce qu'il est en lui-même dès l'origine et dans quoi, pour l'homme, il s'accomplit. Pour cet homme auquel il dispense toutes les conditions de l'autonomie, il sera Dieu le Père, le principe de la Création."
JURANVILLE, PHER, 2019
RELIGION, Névrose, Demande, Dieu
La relation religieuse traditionnelle, qui fait de Dieu l'Autre absolu du désir, s'effectue dans la névrose, parce qu'elle est essentiellement demande, et demande d'amour. Seulement le Père, dans le désir, est celui dont il faut souffrir l'absence - ainsi le Christ dans la Passion. C'est pourquoi la démarche philosophique, parce qu'elle est rupture historique, doit partir du doute radical et donc de l'athéisme - quand bien même elle parviendrait (et elle y parvient, par la spéculation) à réinstaurer l'existence de Dieu et le rôle historique de la religion. Ce n'est que dans le travail de la sublimation que le don d'amour devient effectif, qu'apparaît à nouveau le Visage, et que Dieu apparaît dans ce Visage (pour parler comme Levinas).
VERITE, Signifiant, Infini, Dieu
"La vérité totale du signifiant pur se produit elle-même, elle est acte d’anticipation créateur et en ce sens cause de soi. D’où il résulte qu’il doit exister une vérité totale infinie, qui est Dieu même. Et que, présente en l’homme malgré l’interruption, la vérité totale doit venir en lui, où elle est finie, de la vérité totale infinie de Dieu. Ce Dieu du signifiant pur est le Dieu de la religion. La religion suppose en effet une relation essentielle de l’homme à l’Autre, à Dieu. Pour la métaphysique une telle relation essentielle est inconcevable. Dieu, en tant que le modèle pour l’homme, est l’absolu qui se suffit, l’étant qui est absolument maître du monde comme sien. Ce n’est qu’en concevant le signifiant pur qu’on peut déterminer, en deçà du monde, l’unité subjective d’un étant. Cette unité subjective est jouissance à la jouissance comme sienne, jouissance absolue. Ce qui caractérise le Dieu de la religion. Le signifiant pur permet seul de penser une relation essentielle de l’homme qui soit relation à l’Autre. Sans une telle relation il n’y a pas de religion."
JURANVILLE, LPH, 1984
DIEU, Existence, Trinité, Preuve, DESCARTES
Que découvre le philosophe, lorsque qu'il pose l'inconscient en plus de poser l'existence ? et que découvre le patient, après avoir accompli jusqu'au bout le travail de la cure ? Dans les deux cas, c'est l'existence de Dieu qui est révélée, mais précisément Dieu comme inconscient. C'est la condition pour que le savoir philosophique, le savoir rationnel pur, devienne universellement reconnu ; car il ne fait que confirmer, et vérifier alors le savoir religieux de la Révélation. Et c'est la condition pour que le savoir religieux lui-même apparaisse dans sa rationalité pure, en l'occurrence trinitaire. La vérité de l'existence n'est autre que celle de la Trinité comprise comme Relation, puissance de l'Un absolu de se rapporter à l'Autre comme un autre Soi également absolu (c'est l'engendrement du Fils par le Père), c'est-à-dire comme une autre Personne mais non une autre substance (le Fils est également Dieu). Le Fils quant à lui existe dans sa relation au Tiers qu'est l'Esprit saint (tout aussi divin, quoique tourné vers l'Homme). Aux trois Personnes correspondent les trois preuves de l'existence divine, telles que les a formulées Descartes, toutes trois reposant sur l'idée de perfection. D'abord la preuve par la causa sui (ou « deuxième » preuve par les effets selon Martial Guéroult) se rapporte au Père : elle stipule que si la créature possède pareille idée de perfection, il est manifeste qu'elle même n'est point parfaite ; or si elle était cause de sa propre existence, elle n'aurait pas manqué de s'octroyer toutes les perfections, ce qui implique qu'elle doit son existence à un être extérieur effectivement parfait, capable de se donner à lui-même sa propre existence, soit le Créateur ou Dieu le Père. Ensuite la preuve par l'idée d'infini (ou « première » preuve par les effets selon Guéroult) ne fait que reprendre cette implication au niveau de la logique interne de l'esprit humain, et se rapporte comme telle au Fils : en effet si l'homme possède l'idée d'un être infiniment parfait, il ne saurait être lui-même à l'origine de cette idée, pareille idée ne pouvant être conçue par un esprit fini et imparfait : elle lui a donc été communiquée par un esprit lui-même parfait, celui d'un Dieu Révélateur, soit le Verbe ou Fils de Dieu. Enfin la preuve dite "ontologique" reprend cette implication à un niveau seulement abstrait en apparence, qui se rapporte à l'Esprit saint : en effet l'idée de perfection implique nécessairement l'existence, puisque c'est une plus grande perfection d'exister plutôt que le contraire ; cette preuve exprime la vérité éthique selon laquelle il est meilleur, pour l'humain, de vouloir l'existence (entendre de s'ouvrir à son Autre) plutôt que l'inverse (entendre : se replier sur soi), car il participe alors à la vie divine, à quoi l'engage précisément l'Esprit rédempteur, tout aussi divin que le Père et le Fils. (L'humain cherchera sans doute à en tirer l'idée - fausse - de sa propre divinité, et se repliera fatalement sur son intérêt exclusif, au lieu de prendre en compte, dans l'éthique, l'ensemble de la création.)
DIEU, Existence, Finitude, Conditions, KIERKEGAARD
Pour Kierkegaard l'existence est envisagée comme essentielle en tant que radicalement finie, ce qui n'est pas le moindre des paradoxes. En outre la finitude est radicale parce qu'elle n'est pas une faiblesse, un simple défaut dans le bien, mais un désir du mal pour le mal, un péché. L'acceptation de ce paradoxe ne se fait qu'en entrant dans la "sphère religieuse" où l'on reconnait en l'Autre absolu le siège unique de la vérité, et corollairement en soi-même le siège du péché, de la non-vérité. Or l'homme ne pourrait se rapporter ainsi à l'existence et s'ouvrir à la vérité s'il n'en recevait pas de l'Autre toutes les conditions, à commencer par la grâce : l'Autre se soustrait lui-même de la relation de maîtrise, de soumission fascinatoire dans laquelle le fini voudrait l'enfermer et s'enfermer avec lui, et bien plus il transmet au fini cette disposition à s'ouvrir à l'Autre et à donner lui-même sa grâce. Là réside l'opposition radicale entre l'Autre absolu faux du paganisme et l'Autre absolu vrai de la révélation. Le Dieu vrai du christianisme n'accorde pas seulement sa grâce au fini, mais également le moyen de fixer pour lui la vérité, de se l'approprier, c'est-à-dire d'accomplir son oeuvre et de devenir individu sur le modèle de l'Unique : cette condition est la foi, tout autre chose par conséquent qu'un simple sentiment immédiat d'union avec Dieu. Modèle pour le fini, le Christ l'est enfin et encore s'agissant de se préparer à oeuvrer, non plus à s'abaisser mais cette fois à s'élever pour le bien de l'humanité : ce qui s'appelle l'élection, ou encore "rendre grâce" puisqu'à travers son oeuvre le fini offre à tout Autre, rend d'une certaine manière, la grâce qu'il avait reçue.
DIEU, Etre, Sacré, Paganisme, HEIDEGGER
Heidegger conçoit le sacré à partir de la vérité de l’être, où celui-ci en même temps se révèle et se retire devant l’homme. Dans cet espace du sacré advient la Divinité, incarnée par l’homme lorsqu’il s’élève à l’être, ou par l'"extraordinaire" de l’œuvre. C’est là qu’est censé apparaître le "Dieu nouveau", dont Hölderlin disait que "lui seul peut nous sauver", en offrant un modèle inédit (éventuellement proche du Bouddhisme mais échappant aux catégories du monothéisme et du polythéisme), dont les aspects pluriels seraient directement en rapport avec "la richesse initiale des fondements" assure Heidegger. En tout cas, si ce dernier refuse l’idolâtrie, il ignore la nécessité de la révélation judéo-chrétienne et sa conception du sacré conserve les principaux aspects du paganisme, dont la logique sacrificielle (que la philosophie combat depuis toujours) puisque "chaque étant est sacrifié à l'être, et c'est seulement de là que l'étant comme tel reçoit sa vérité" (Heidegger).
DIEU, Cause, Temps, Preuve, DESCARTES
On trouve chez Descartes trois preuves de l'existence de Dieu. La première est la preuve ontologique : imaginaire, ou circulaire, elle présuppose cela même qu'elle cherche à établir, soit la consistance du savoir. La second est la preuve par l'idée d'infini : celle-ci s'avère plus radicale car elle doit franchir le cap du doute hyperbolique et l'hypothèse de la folie. Elle se situe au plan symbolique : quoi qu'il arrive, l'homme pense, et parmi ses idées (le système du symbolique pour Lacan) se trouve l'idée d'infini (le Nom-du-Père qui relie le symbolique au réel). Mais la seule qui puisse établir la consistance de Dieu en dehors de la relation à l'homme est la preuve par la "cause de soi". Pour Juranville elle se situe au niveau de la consistance du signifiant pur, qui implique un temps réel. S'agissant d'expliquer comment la substance humaine finie peut perdurer dans l'être, il n'est besoin que d'invoquer le concours de la substance divine infinie, mais encore faut-il supposer que celle-ci soit pleinement cause d'elle-même, et c'est bien ce que fait Descartes, ne confondant nullement à ce stade la cause avec la raison et ses enchaînements. Comme avec le cogito, au plan humain, il y a rupture avec la temporalité mondaine.
DIEU, Autrui, Absolu, Raison, LEVINAS
"Mais ce n'est pas parce que le nom de Dieu vient dans le savoir et le discours qu'il peut être légitimement posé dans la raison et comme raison. De là le refus, par Lévinas, de toute preuve de l'existence de Dieu. Comme Rosenzweig, il montre ce Dieu appelant les hommes à instituer, contre le paganisme, un monde juste. Mais pas plus que Rosenzweig il ne considère qu’un tel monde puisse être posé réellement, c’est-à-dire rationnellement juste ; que ce monde puisse rendre raison de ce Dieu, lui rendre la raison que ce Dieu aurait donnée aux hommes ; que ces derniers puissent le poser comme absolu et en même temps raison."
JURANVILLE, PHER, 2019
DIEU, Raison, Absolu, Individu
Dieu n'est pas seulement l'altérité absolue de la révélation et son essence, il doit également être posé par la philosophie, si elle veut pouvoir le penser conceptuellement, comme l'absolu de la raison. Raison et absolu est donc ce qui définit Dieu. L'homme, destinataire de la révélation, destiné à devenir individu, doit d'abord poser la raison dans son absolu (en Dieu), s'il veut pouvoir reconstituer, peu à peu, toute vérité à partir de soi. Il semble vain de se prétendre un tel individu si l'on ne fait que supposer la raison en soi, car alors cette raison ne peut que se révéler impuissante à régler les affaires du monde.
DESTIN, Histoire, Election, Tragédie, LACAN
Le destin est toujours synonyme d'inégalité, entre l'élu d'une part et l'Autre d'autre part qui lui adresse son destin. Le héros tragique, à ce titre, est bien l'incarnation d'une contradiction essentielle, dont la résolution marque l'impossibilité d'échapper au "destin "; mais il s'agit là d'une destinée mythologique. Alors que dans le destin véritable, existentiel, le héros prend conscience d'une autre impossibilité, celle d'échapper à l'Histoire. Le destin mythologique, dictant ce qui doit être de toute éternité, fait du héros une victime (de là la conception commune, populaire, du destin, qui l'assimile à la fatalité et notamment à la mort accidentelle). Le héros historique, lui, se trouve confronté à une finitude autrement radicale, car il a à re-constituer une identité, que certes l'Autre lui destine, mais qui dépend entièrement de son oeuvre et finalement de son histoire personnelle, censée changer l'Histoire universelle. Les pensées de l'existence, de Kierkegaard à Heidegger, si elles reconnaissent le caractère essentiel d'un tel destin, non pas comme prédestination mais ouverture à l'imprévisible réel, excluent en général toute possibilité de mener à terme l'oeuvre historique, d'obtenir la reconnaissance, et donc d'accomplir le destin. S'il n'est pas nécessairement voué au sacrifice, le héros ne peut rencontrer que l'échec, comme si l'élection (et la grâce) n'était finalement que tromperie. Et dans la conception psychanalytique, le sujet sait bien qu'il y va de son destin à se confronter au grand Autre, à l'inconscient, et il saura que son symptôme n'était qu'une expression du refus d'affronter le destin ; et cependant, là encore, il n'est pas censé dépasser le stade éthique d'une certaine honnêteté envers lui-même et les autres, sans que le savoir du symptôme ne débouche sur un savoir rationnel pur, sur l'oeuvre de l'histoire.
DESTIN, Question, Peur, Singularité
Celui qui pose la question essentielle présuppose avoir reçu de l'Autre les conditions de son autonomie pour s'engager dans la quête du savoir et de l'œuvre reconnue. Qu’est-ce qui lui fait donner une vérité objective à la peur et dépasser le tragique pour instituer un monde juste ? Le destin. Car la loi qui appelle le fini à l’autonomie est d’abord rejetée par le monde social ; il faut alors la reconstituer contre les autres et pour les autres. Cela suppose de s’établir dans sa singularité et d’en donner vérité - définition même du destin.
DESTIN, Election, Histoire, Autre
"Nul ne peut avoir de destin s’il n’assume pas l’élection. Et tous n’assumeront pas effectivement l’élection. Mais d’une part ce destin a été, de même que l’élection, offert à tous. Le destin (au sens de l’Autre qui destine) appelle chacun à son destin (au sens de ce qui lui est destiné, et à quoi il est destiné). Pas plus qu’il n’y a, dans l’élection, de préférence, il n’y a, dans le destin, de prédestination. Et d’autre part le destin de ceux qui se sont engagés dans leur destin ne s’accomplirait pas, si n’était pas reconnu de tous, dans le monde juste, que chacun a reçu toutes les conditions d’un tel destin. Si le destin n’était pas alors posé comme celui du peuple tout entier – à partir de quoi tel ou tel entre effectivement dans son destin. Le destin est ainsi toujours celui de l’histoire."
JURANVILLE, JEU, 2000